Ça bouge dans le bordelais car il y a de plus en plus de monde qui pense que "l'appellation" Grand vin de Bordeaux (quelle modestie !!!) devra rimer avec bio dans les années à venir. Cela fait quelques années qu'un virage a été amorcé mais c'est maintenant une évidence pour pas mal de monde, les vins de demain devront être plus "propres". J’espère que ça ne sera pas juste un virage … "marketing" et que pas mal de vignerons iront au bout de l'idée afin que l'on puisse réellement voir transparaitre le terroir bordelais trop souvent laissé pour compte que ce soit à la vigne ou au chai.
Henri Duporge lui est loin de tout ce brouhaha "commercial" puisqu'il a enclenché sa démarche en bio puis en biodynamie depuis l'an 2000. Je suis passé au printemps dernier pour une petite visite de son Château Le Geai. Normalement il ne reçoit que des professionnels mais bon, en lui parlant de ma passion et du blog, j'ai quand même réussi à pousser sa porte. Et son accueil a été plein de franchise et sans filtre au bout d'une heure.
Les 16 hectares de vignes du domaine sont situées sur Bayas et domine l'Isle, une rivière qui rejoint la Dordogne un peu avant Libourne. Il travaille les sols au cheval mais l'herbe est présente la majeure partie du temps.
Au chai, Henri est un grand fan du "glougloutage". C'est une méthode d'immersion du marc dans son jus qui est possible grâce à la forme des amphores qui coincent la matière sur le haut tout en laissant du jus sur le dessus. Du coup un doux bruit s'échappe des amphores et donne une vraie vie à la vinification qui se fait tout en douceur.
Les 2019 étaient toujours en fermentation en ce mois de mars et ça ne le dérangeait pas plus que ça car il donne une grande part au temps sur tous ses vins.
Les 2019 étaient toujours en fermentation en ce mois de mars et ça ne le dérangeait pas plus que ça car il donne une grande part au temps sur tous ses vins.
La passion pour son terroir Bordelais ainsi que sa connaissance de l'historique des cépages et des méthodes de travail qui ont jalonné cette région font que l'on se retrouve vite à boire ses paroles avec des mots qui résonnent encore dans mes oreilles.
Bon et ces cuvées, ça donne quoi?
Les merlots de Léo c'est comme un Lambrusco mais bordelais, ça pétille un peu et ça descend beaucoup … sans pour autant manquer de fond. Bu un peu frais c'est comme une petite bombe de fruits drôlement … bons !!!
Les argiles de Pauline sont vinifiés et élevés en amphore pendant 16 mois, sans soufre et avec juste des raisins de merlot et malbec. C'est un vin qui demande encore du temps mais les arômes de fruits noirs et d'olives accompagnent une belle patine presque soyeuse.
On a aussi gouté Ultrableue, un 100% malbec qui a été vinifié en jarre puis élevé une bonne partie en amphore et le reste en fût. Une micro cuvée sur laquelle je reviendrai une autre fois.
Henri vinifie aujourd'hui sans souffre mais c'est avec franchise qu'il me parle de ses débuts et des petites galères qu'il a traversées pour arriver à ce résultat. Le sans souffre, il l'avait laissé de coté pendant trois ans, de 2010 à 2012, pour repartir avec des doses infimes par la suite et réussir à s'en passer maintenant.
Un long chemin qui lui permet de faire des vinifications sur levures indigènes avec beaucoup de patience mais surtout avec le plus important...de très beaux raisins.
Ah, sinon pour les purs natures, il faut aussi gouté son pet nat hydromel, une boisson qui apporte un peu de...folie et qui répond au doux nom de Beebine
Pour finir, j'ai ouvert la cuvée Plasma (100% cabernet sauvignon) sur 2018 le week-end dernier.
Au débouché, le vin a un nez ferreux et métallique alors que la bouche a un fruit rond et savoureux mis en valeur par une tension intéressante qui vous emmène vers la terre. Les tannins sont accrocheurs et demandent encore un peut de temps. Un beau grain reste en bouche avec toujours cette tension vers l'acidité qui garde le vin sur une longueur au dessus de la normal. C'est jeune mais la carafe devrait le révéler…
Après un peu plus d'une heure de carafe, le vin s'est bien ouvert et le nez a pris du volume avec des fleurs (de mimosa je pense), des épices douces, le fer qui est encore un peu présent mais plus avenant, attisant ma curiosité, et des petits galets qui apportent un coté minéral très intéressant. La bouche s'est arrondie et la grosse et belle acidité qui étire le vin est accompagnée de la fluidité d'une rivière qui donne beaucoup de plaisir et presque de la gourmandise.
C'est très bon quoi !!!
Après deux heures le vin "pommade" un peu, pour encore plus de plaisir, sur des groseilles puis les myrtilles, la figue et un beau raisin frais sur un court moment. Enfin c'est bien vivant, fondu et ça descend tout seul. Un enchantement qui donne l'impression que les arômes sont au bout du "fil" de l'acidité, un fil qui pourrait être celui d'une canne à pêche avec au bout la prise, des arômes qui au fil du temps ce révèlent et m'emportent avec eux pour rêvasser tranquillement au bord de l'eau…
Un gros plaisir ce Plasma !!!
Voilà, je suis content de vous avoir parler de ce domaine familial car je trouve que ces vins expriment vraiment le terroir bordelais et j'espère qu'en croisant une bouteille de Château Le Geai vous prendrez autant de plaisir que moi. Merci encore à Henri pour son accueil.